Il lui a dit dès le début qu’il ne quitterait jamais son épouse. Histoire connue. Elle a accepté les miettes de la table. Elle est la femme de l’ombre.
Au fil du temps, elle s’est attachée à lui. Il lui est devenu indispensable. Ils prennent toutes les précautions possibles pour que Madame ne se doute de rien lorsqu’il la rejoint.
Ils sont en correspondance permanente via leur adresse mail. C’est l’équilibre dans la clandestinité. Ils en oublient que c’est fragile.
Les années passent, ils sont chacun une part de l’autre. Lui a trouvé auprès d’elle le plaisir physique qu’il n’a pas chez lui, une écoute, une bienveillance qu’il ignorait jusque là. Elle se love à chaque fois dans les bras d’un amant attentionné, soucieux de son bien-être, comme elle n’en a jamais connu. Il est son soutien, son confident. Lui partage tous ses soucis, les problèmes avec les enfants, avec sa femme… elle trouve à chaque fois les mots qu’il faut pour lever ses doutes et le rassurer. Il lui dit qu’il ne pourrait plus se passer d’elle, qu’elle lui est devenue indispensable comme le soleil à l’arbre. Et l’inverse est vrai aussi.
Et puis arrive ce qui devait arriver. Madame tombe sur un mail sans équivoque. Elle crise. La fidélité et la confiance sont tout pour elle, s’imagine-t-il. Comment a-t-il pu lui faire ça ? Il est bouleversé, il culpabilise à mort et bien sûr il vient se confier à sa maîtresse. Sa femme ne lui pardonnera pas, elle va le quitter, tout est fichu. Et sa maîtresse lui répond : « Mais non, elle ne te quittera pas, elle a des défauts mais pas celui d’être idiote, tu n’imagines quand même pas qu’elle va renoncer à sa vie de plaisirs permanents, juste pour une question de principe. Elle te le fera croire, bien sûr, et elle prétendra qu’elle te pardonne, du bout des lèvres, en réclamant encore plus d’avantages matériels parce que si tu crois que pour elle ce qui compte d’abord c’est ta fidélité, tu te trompes, ce qui importe ce sont les avantages matériels que tu lui apportes et parader en tant que Madame Machin… Mais il ne veut pas l’entendre. Il lui dit que sa femme ne laissera pas passer son infidélité, qu’il est sûr qu’elle va le quitter, qu’il est un moins que rien, un salaud qui a trompé une femme parfaitement fidèle. Et voilà que la maîtresse se met à espérer, que ce soit lui qui ait raison, que la légitime prenne ses clics et ses clacs et qu’outrée elle s’en aille, bardée d’une coquette pension alimentaire.
Mais bien sûr c’est lui qui se trompe. Tout se déroule comme elle l’avait prévu. Madame lui donne l’absolution en échange d’un beau voyage et d’une augmentation de son argent de poche. Il est content, il remercie son amante pour sa clairvoyance, il n’oubliera jamais ce qu’elle a fait pour lui. Seulement maintenant, il n’a plus droit au moindre faux pas. Sa femme exige le contrôle de son portable, et il le lui cède, c’est quand même la moindre des choses… Alors il ne lui écrira plus que de son bureau, finis les weekends à s’envoyer des mots doux, ses vacances seront des semaines de silence. Quant aux rendez-vous , il n’est plus question d’y penser. Il est si reconnaissant à sa femme d’avoir l’immense bonté de lui pardonner à lui, ce salaud infidèle.
Elle est effondrée. La légitime vient d’avoir sa peau, elle n’a plus qu’à soigner son cœur brisé tandis que l’autre crise tous les soirs et abreuve son mari d’injures. Nul doute, se dit l’amante, elle jouit enfin, cette garce si rétive au plaisir qu’elle n’a aucun mérite d’être fidèle.
Un jour elle a demandé à son amant : « Mais toi, pourquoi ne la quittes-tu pas ? ». Et il a répondu, je n’ai pas envie d’être plumé. Elle a exigé que je mette une part importante de mes biens à son nom et j’ai eu la faiblesse de le faire. L’amante a pensé qu’il était irrémédiablement idiot et soumis… Oui, il est soumis à sa femme et quelque part il doit aimer cela… comme la braver sans doute. L’adultère ne serait pas aussi savoureux pour lui, s’il ne comportait pas de risque. Il en a le goût, son statut d’homme d’affaires à succès en témoigne.
En attendant, elle souffre et elle le lui dit en pensant qu’elle est bien bête d’avoir aimé un homme qui appartenait à une autre. Que va devenir sa vie sans lui, sans sa tendresse, sans son regard qui lui dit qu’elle est belle ? Son monde s’est écroulé. Elles sont loin ses belles paroles où il déclarait qu’il ne pouvait vivre sans elle. Entre elle et Madame, il n’a pas hésité.
Voilà trois jours seulement que la crise s’est déclenchée. Elle n’est pas terminée d’ailleurs, Madame engueule Monsieur tous les soirs, mais il est assuré qu’il n’y aura pas de divorce. Alors l’amante reçoit ce mail de lui : « Je suis en train d’élaborer un plan pour qu’on puisse à nouveau se retrouver, il n’y a qu’à …. »
Elle sourit, rassérénée. Décidément, il est indécrottable et plein d’imagination, quelle chance elle a !
😀
Tout à fait. Il y a celle qui aime le mariage (la carrière réelle de ce type de femmes) et celle qui aime l’homme. Et l’homme qui entend ce qu’il veut entendre, rêve à des « on ne sait pas de quoi l’avenir sera fait, chérie, sois confiante », et se laisse mettre aux fers en se flagellant avec des orties 🙂
L’orgueil de l’épouse la ronge, l’amour de l’amante la ronge et la culpabilité du mari le ronge.
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Mais au final, chacun des protagonistes n’y trouve-t-il pas son compte ? Bises Edmée.
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Bien sûr que si sinon la liaison n’existerait plus… Disons que malgré tout ce sont des situations pour lesquelles il faut que l’équation frustration/bonheur soit en général favorable. Et quand ça bascule, un ou deux aller-retour de balance et on retrouve l’équilibre… 🙂
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Belle analyse, très réaliste. J’adore la chute finale. :))
Et en même temps on se dit que ces deux-là étaient fait pour vivre ensemble. Mais s’ils l’avaient fait, leur relation aurait sans doute perdu une grande partie de son charme.
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Merci Jean-François pour ton commentaire et ta… fidélité à mon blog
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Je m’attendais à une autre chute
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J’espère que tu n ‘as pas été déçue Maryelle. J’ai juste voulu être drôle…
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